Anila Hussain, styliste audacieuse au service de l’éducation
Ces cœurs qui battent pour Genève ! Le CDE présente une rencontre mensuelle, en principe chaque dernier lundi du mois, nous amenant à rencontrer "7coeurs qui battent pour Genève". Au départ, cette initiative est née grâce à l’ouvrage "126 battements de cœurs pour Genève", écrit par Zahi Haddad et publié par les éditions Slatkine, présentant 126 personnalités proches de la Genève internationale, dont les parcours de vie sont inspirants. Voici le portrait de Anila Hussain que vous pourrez rencontrer lors du dîner-débat du lundi 27 juin.
Anila Hussain
- Karachi, 1982
- Mode et éducation – SHENANNZ
- « L’Hôtel de la Paix, un lieu au nom symbolique, où j’ai choisi d’organiser plusieurs séances photo. »
Une idée a guidé Anila Hussain dès l’enfance : l’estime de soi. Une notion forte, prônée par ses parents, « même si notre société ne mettait pas toujours en avant les femmes ». Pour s’affirmer, Anila se lance, dès l’âge de huit ans, dans l’athlétisme. Et, pour ne pas faire facile, elle jongle avec les épreuves. Sprint, demi-fond, sauts en longueur et en hauteur, lancer du poids, elle y met toute son énergie. Jusqu’à l’excellence et aux trophées qui la récompensent.
Cette confiance lui permettra d’ouvrir de nombreuses portes vers le succès. D’abord, celle de l’université de Karachi où elle étudie la gestion d’entreprise. Un cursus qu’elle interrompt, pourtant, pour se marier, avant de le terminer à Genève, où elle suit son époux. En mai 2002. Pendant qu’elle s’occupe de la famille qui grandit, Anila travaille dans une école Montessori et se forme à la pédagogie mise au point par la célèbre praticienne italienne. Il lui faut ensuite attendre de revoir sa sœur, styliste au Pakistan, pour poser les grandes lignes de SHENANNZ, en 2010. Toutes deux souhaitent combiner mode et éducation et aider les communautés fragilisées à prendre leur place dans la société, tout en respectant les principes du développement durable. Construite avec les prénoms des deux femmes, Anila et Shenila, la marque veut aussi être un symbole : « Nous voulions marier nos visions et nos mentalités, qui ont évolué sur deux continents, dans des environnements complètement différents. »
Anila se forme alors avec l’antenne genevoise de Fashion Revolution, mouvement mondial qui milite pour la transparence dans la chaîne d’approvisionnement dans le secteur de la mode et met en avant l’éthique et l’équité. Anila présente son projet lors de conférences internationales organisées par le World Economic Forum, EBBF, Women Economic Forum, l’initiative She-Trades ou encore l’OWIT, l’organisation des femmes dans le commerce international. En 2014, SHENANNZ est prête et est offerte aux femmes, dès 2016, simultanément à Gen.ve, Karachi et Londres.
Styliste audacieuse au service de l’éducation
Dans sa ville natale, Anila engage des femmes avec lesquelles elle travaille sur la confiance en soi, avant de leur apprendre les secrets d’une couture fine, colorée. Haute. Travaillée avec des tissus aussi nobles que la soie française ou le coton pakistanais. Cent pour cent. Traçables aussi. Anila introduit même la méthode Montessori dans les bidonvilles pour aider des familles entières qui rejoignent, elles aussi, l’œuvre SHENANNZ, en occupant divers postes dans l’entreprise. « Une partie des bénéfices engendrés par la vente de vêtements est consacrée à la Fondation que nous avons créée pour encadrer nos actions sociales. » Anila n’oublie pas les siens : « J’implique mes enfants, mes neveux, pour les sensibiliser à notre démarche. »
En rémunérant ses collaborateurs de « façon juste » et en leur donnant les moyens, SHENANNZ favorise l’accès à l’éducation et envisage même, avec optimisme, la construction d’un bâtiment qui devra réunir une fabrique de vêtements et une école. « Les enfants ne peuvent pas attendre, il faut agir rapidement ! » Dans l’intervalle, Anila et sa sœur répliquent leur modèle en Afghanistan, au Ghana et au Togo. Trois pays séduits lors d’une conférence donnée par Anila au World Economic Forum. Un tremplin également pour le style SHENANNZ qui se transmet déjà dans les boutiques ouvertes à Doha, Dubaï, Etoy, Genève, Londres et Karachi. « Chaque fois, avec des produits exclusifs et spécifiques à chaque pays. »
Battante, Anila vibre de sa conviction. Comme si son accomplissement était normal, facile. Une évidence. Inspirée par sa fille, qui l’encourage à reprendre l’athlétisme, elle jongle avec ses idées, les concrétise presque au moment même où elle les formule. « Et cela est plus facile à faire depuis Genève, grâce à la crédibilité que cette ville apporte. »
Zahi Haddad